Depuis le début de la décennie, les acteurs de la legaltech se multiplient, avec une orientation de plus en plus B2B. Quels services proposent-ils aux entrepreneurs ? Comment les acteurs de la legaltech et professionnels du droit se complètent-ils pour les accompagner ? Se dirige-t-on vers une dématérialisation complète du droit ? Comment savoir à quel site se vouer ? Tour d’horizon d’un secteur qui évolue à vitesse grand V pour y retrouver son latin.

La legaltech, cet écosystème de sociétés qui utilisent les nouvelles technologies pour évoluer dans le domaine du droit, est un marché en pleine expansion. D’après une étude réalisée en 2017 par Day One dans douze pays différents, leur nombre a explosé depuis 2013, avec en moyenne 22 créations de legaltechs par an, et un pic à 45 en 2015 ! Le dynamisme du salon Village de la LegalTech témoigne aussi du développement de ce marché, qui a attiré pour sa deuxième édition fin 2017 plus de 2000 visiteurs.

Cette croissance s’appuie sur les besoins des entrepreneurs et des particuliers, mais aussi des avocats et professionnels du droit, qui après une phase de méfiance, utilisent désormais les legal technologies pour améliorer leur productivité.

Comprendre le concept de legaltech

Avant d’aller plus loin, faisons une pause lexicale afin de ne pas mélanger les torchons et les serviettes. Alexis Deborde, fondateur de Leganov et Hercule, agence qui accompagne les cabinets d’avocats dans leur stratégie d’innovation, mais aussi membre de l’association Open Law, explique : « Le legaltech, c’est un ensemble de technologies appliquées au droit qui vient transformer les modes de production et de livraison de services juridiques. La LegalTech, c’est un écosystème d’acteurs qui innovent et utilisent ces technologies pour modifier la pratique traditionnelle du droit. Dès lors, on comprend que la LegalTech recouvre une grande diversité d’acteurs du droit (avocats, huissiers, notaires, éditeurs juridiques et start-up numériques du droit) et que le terme ne doit pas être réservé aux seules start-up du droit. »

Qui sont les acteurs de la legaltech ?

Parmi les poids lourds sur le marché du droit en ligne, on recense Captain Contrat, Legalstart, Wonder.Legal (ex Document-juridique.com), Demander Justice… et beaucoup, beaucoup d’autres. Le Village de la Justice, premier site communautaire des professionnels du droit, tient à jour un annuaire des acteurs présents sur le marché français, actualisé très régulièrement.

Certains sites ou applis, comme Call a Lawyer ou Mes Droits, Mon Avocat, émanent d’initiatives de professionnels du droit venus se positionner sur ce marché. Vous pouvez y poser votre question à un avocat en ligne, et obtenir une réponse rapide pour un coût modique. « Les avocats aussi ont créé leur propre LegalTech, précise Alexis Deborde, certains ont bien compris que le numérique avait transformé de manière irrévocable le secteur du droit. » Pas tous, d’autres estimant que tout ceci n’est qu’un effet de mode et que le soufflé retombera. On en reparle dans quatre ou cinq ans pour départager tout le monde.

Quel est le périmètre d’action des start-up de la legaltech ?

Pour bien comprendre ce qu’une plateforme de la legaltech peut, ou ne peut pas vous apporter, il faut revenir aux fondamentaux du droit français : « Les seuls habilités à délivrer du conseil sont les avocats, rappelle Laurine Tavitian (membre de l’équipe du Village de la Justice, qui établit l’Observatoire Permanent de la LegalTech et des sociétés du droit), et les plateformes qui en proposent sont en infraction. » Voilà qui est dit : n’attendez pas que l’on vous fournisse un conseil en ligne (et si c’est le cas, sachez donc que c’est illégal).

Ces nouveaux acteurs du marché du droit se sont donc positionnés sur un autre sujet : ils proposent de rédiger des documents juridiques moyennant des coûts compétitifs. Comment ça marche ? L’entrepreneur répond en ligne à un questionnaire très détaillé, remouliné ensuite par un algorithme afin d’automatiser cette rédaction. Selon le package choisi, l’entrepreneur s’occupe ensuite des formalités de dépôt ou d’enregistrement de son document, ou bénéficie d’une relecture et du dépôt par un formaliste. « C’est pratique, on a une visibilité sur tous ses documents en cours, sur l’avancée des formalités, et on évite les impressions et les échanges de paperasse grâce à la signature en ligne », explique Jonathan Malka, résident chez Wojo, dirigeant de E-commerce Invest, et utilisateur de la plateforme Legalstart.

Si l’entrepreneur a une question précise ou que sa situation requiert un conseil personnalisé, il peut être mis en relation avec un avocat via la plateforme, et c’est alors le professionnel qui reprend la main.

« Finalement, ces plateformes apportent du business aux avocats, complète Alexis Deborde, puisque des entrepreneurs qui n’auraient pas forcément pensé à consulter un avocat vont mieux comprendre leur problématique grâce à l’accès à l’information qui leur est donné, et prendre conscience que leur projet nécessite un conseil plus avisé. Cela ouvre un nouveau marché aux avocats. »

Quels services en ligne pour faciliter la vie des entrepreneurs ?

Les premières sociétés de la legaltech qui ont pénétré le marché du droit proposaient de la rédaction de documents juridiques lors de la création de sa société. « Cela a vraiment été le point de départ, explique Laurine Tavitian. Beaucoup de TPE et PME n’avaient pas accès au droit, n’allaient pas voir des avocats, et les sociétés de la LegalTech leur ont apporté un service juridique de qualité. »

Aujourd’hui, l’offre s’est étoffée, et les entrepreneurs peuvent utiliser ces plateformes automatisées pour la rédaction de :

  • leurs statuts
  • leurs conditions générales
  • un contrat de travail ou de sous-traitance
  • un bail commercial
  • une convocation à une assemblée générale

On y trouve aussi des offres packagées d’accompagnement au licenciement, de dépôt de marque, de recouvrement de créances… tout ceci utilisant des générateurs automatiques de documents. Simple, efficace, rapide… tant que l’on reste sur des démarches basiques.

Avocat ou plateforme en ligne, vers qui se tourner ?

On a envie de vous dire : à vous d’en décider ! En effet, c’est à l’entrepreneur d’évaluer les éventuelles particularités de son dossier, aiguillé si besoin par les plateformes. « Quand une étape d’un questionnaire automatique comprend une question complexe ou difficile, certaines plateformes l’indiquent à l’entrepreneur, en lui conseillant de se rapprocher d’un professionnel du droit. La personne reste libre, mais une alerte est donnée sur les questions sensibles », explique Laurine Tavitian.

En résumé, pour des besoins simples, les plateformes automatisées apportent des réponses rapides, compétitives et souples aux entrepreneurs. L’avocat reste incontournable si l’on a des questions spécifiques ou un domaine d’activité sensible, et il peut alors se concentrer sur sa valeur ajoutée, le conseil, par exemple en personnalisant un contrat type rédigé par une plateforme, plutôt qu’en perdant du temps à le rédiger entièrement.

« Aujourd’hui, on est plus dans une logique de partenariat que de concurrence entre start-up de la LegalTech et avocats, ce qui est nouveau », se félicite Alexis Deborde. La jeune garde des avocats ne s’y trompe pas puisque le barreau de Paris a créé en 2014 son Incubateur, qui récompense chaque année les initiatives et projets innovants sur le marché du droit.

Quid de la fiabilité et de la question de responsabilité ?

Ici, l’on entre dans une zone plus floue, où chacun doit se montrer prudent et faire appel à son bon sens pour fonder sa confiance. En l’absence de label officiel, les professionnels du droit ont donné naissance à la Charte Ethique pour un marché du droit en ligne et de ses acteurs. Pilotée par les associations Open Law et ADIJ (Association pour le développement de l’informatique juridique), cette charte établit un ensemble de règles visant à garantir les compétences des services proposés par une LegalTech, le respect des obligations en matière de sécurité et de confidentialité, et la responsabilité des acteurs de la LegalTech. S’assurer que la start-up à laquelle on s’adresse pour ses démarches juridiques a bien signé cette charte est un gage de sérieux.

Concernant la responsabilité, le sujet est épineux. Si l’entrepreneur a donné des réponses erronées ou omis des informations, difficile d’engager la responsabilité de la start-up. Mais si le questionnaire était mal tourné, l’entrepreneur pourrait se retourner contre elle. On revient à la case « avocat » qui, lui, engage sa responsabilité sur les documents qu’il délivre et dispose d’une solide assurance de responsabilité civile en cas d’erreur. Sachez toutefois que les sociétés qui signent la Charte éthique s’engagent à souscrire une assurance responsabilité civile, pour un montant qui reste néanmoins bien inférieur à celui assuré pour les avocats.

Il est également important de garder en tête le risque de simplification excessive du droit, et de préférer se tourner vers des start-up dont un ou plusieurs fondateurs disposent de solides compétences juridiques, gages d’une meilleure collaboration avec les professionnels du droit.
Vous y voyez plus clair sur les facilités offertes par l’écosystème de la legaltech… et ses limites ? Restez informé des évolutions du secteur en notant dès à présent dans votre agenda le prochain salon professionnel Village LegalTech, qui se tiendra en novembre 2018.

BON À SAVOIR SUR LA LEGALTECH  

  • Seul un avocat est habilité à délivrer du conseil.
  • Les start-up de la LegalTech vous offrent un accès simplifié au droit pour vous informer sur les formalités juridiques, et des coûts compétitifs grâce à l’automatisation.
  • Vous pouvez rédiger de manière automatisée des documents juridiques sur la base de questionnaires élaborés, que vous remplissez seul.
  • Le recours à un avocat est (vivement) recommandé en cas de questions ou de situation spécifique.
  • Vérifiez que la plateforme utilisée a bien signé la Charte Éthique pour un marché du droit en ligne et de ses acteurs.

À PROPOS

Laurine Tavitian est responsable éditoriale de Village de la Justice, premier site communautaire des métiers du droit, qui comptabilise plus d’un million de visiteurs uniques par mois, et propose des articles de fond et d’actualité sur le marché du droit, un Observatoire permanent de la LegalTech et des métiers du droit, ainsi que des forums très actifs. La société organise aussi des événements en rapport avec le droit, comme le salon professionnel Village LegalTech (prochaine édition en novembre 2018).

Alexis Deborde a fondé Leganov, acteur historique de la LegalTech, qui a récemment fusionné avec Contracteo pour donner naissance à Hercule The legal tech agency, qui accompagne les cabinets d’avocats dans leurs réflexions digitales, et développe des solutions technologiques adaptées à leur transformation numérique. Membre de l’association Open Law Pour un droit ouvert, il a été pilote de la rédaction de la Charte Éthique pour un marché du droit en ligne.

Au fait, chez Wojo on ne fait pas qu’écrire !

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