Et si la percée de l’intelligence artificielle dans nos sociétés allait contribuer à nous rendre “plus humains” au travail ? Voire, à nous faire réaliser combien notre humanité est précieuse et digne d’être valorisée ? Les rapports récents de plusieurs experts et instituts tendent à le suggérer. Interviewée par le Pew Research Center 1, Susan Price, architecte digitale à Anaconda Inc. 2, résume ce phénomène : « Les machines seront de plus en plus assignées aux tâches pour lesquelles elles sont mieux équipées que les humains, telles que l’informatique, l’analyse de données et la logique. Celles nécessitant de l’intelligence émotionnelle, de l’empathie, de la compassion, du discernement ou encore du jugement créatif vont alors s’étendre et prendre de la valeur. »

Alors, quels seront les métiers de demain et comment voir l’avenir ? Quelques pistes de réflexion.

Des projections à prendre avec précaution

À quoi ressembleront les métiers de demain ? Difficile à dire, comme en témoigne le rapport de The Institute For The Future 3, selon lequel 80% des élèves actuellement scolarisés feront un métier qui n’existe pas encore. Certes, l’automatisation de nombreuses tâches risque d’entraîner la disparition d’un grand nombre de métiers traditionnels. En janvier 2017, une étude du McKinsey Global Institute indiquait déjà que dans 60% des métiers existants, nos technologies actuelles permettraient d’automatiser 30% des tâches requises pour les pour accomplir… Mais comment interpréter cette information ?

Quels métiers à pourvoir demain ?

S’il est incontestable que certains types d’emploi seront remplacés par la machine, pour autant 30% ou plus d’automatisation d’une tâche ne signifie pas que le métier en question va disparaitre : il va considérablement se transformer.

Voilà pourquoi les experts s’accordent à dire qu’il est faux de penser qu’on se retrouvera alors face à une pénurie de travail.

Ensuite, la progression de l’intelligence artificielle va amener la création de nombreux nouveaux métiers : de l’intelligence artificielle à la réalité augmenté en passant par la réalité virtuelle, la technologie va d’une part imposer de nouveaux besoins nécessitant une supervision humaine et d’autre part, permettre l’idéation de services dont nous n’avons même pas encore l’idée !

Ajoutons à cela tous les métiers en devenir autour des thèmes du développement durable, de la gestion de nos déchets, de l’optimisation de notre consommation d’énergie… mais aussi l’accompagnement de notre population vieillissante et autres services à la personne.

Côté nouveaux métiers, on prédit l’avènement des cyber-city analystes, des architectes de la réalité augmentée, des éducateurs de robots, des professionnels de l’agriculture urbaine, ou encore une granularisation des métiers de la communication dans un monde toujours plus connecté, où l’information circule en temps réel et où le droit à l’oubli et à l’erreur diminuent de jour en jour. À bon entendeur…

Quels métiers menacés demain ?

L’institut Sapiens 4 a récemment listé cinq métiers voués à disparaître :

  • Employés de banque et assurance : extinction estimée entre 2038 et 2051.
  • Employés de comptabilité : extinction estimée entre 2041 et 2056.
  • Secrétaires bureautique et de direction : extinction estimée entre 2053 et 2072.
  • Caissiers et employés libre-service : extinction estimée entre 2050 et 2066.
  • Ouvriers de manutention : extinction estimée entre 2071 et 2091 (considéré parmi les métiers les plus pénibles et les moins sécurisants par la DARES).

Faut-il s’inquiéter ? Non. Mais se tenir informé, oui. Un bon moyen de suivre les tendances et connaître des besoins des entreprises est de consulter les enquêtes annuelles BMO (Besoin en main-d’œuvre) de Pôle emploi : la dernière en date classe les informaticiens deuxièmes, juste derrière les aides à domicile et les aides ménagères dans le top 15 des métiers en tension… Et un coup d’œil au top 10 des métiers les plus demandés permet de voir que les métiers de la restauration, de l’animation, les artistes, les conducteurs routiers (en attendant la voiture autonome…) font bel et bien partie des métiers de demain.

Que faire alors, si son emploi semble susceptible d’être intégralement remplacé à moyen terme par la machine ? Prendre conscience de sa valeur et garder confiance : il y a dans chaque métier, des compétences et qualités qui permettront à chacun de pivoter suffisamment pour préserver son employabilité ! À condition toutefois de se tenir prêt à évoluer et à travailler en acceptant d’exploiter toutes les possibilités offertes par la machine, par le digital et/ou l’IA…

Un marché du travail en pleine transition

Travailler rimera avec apprendre :

Les métiers de demain changent également dans leur essence. Il y a vingt ans déjà, le sociologue polonais Zygmunt Bauman conceptualisait l’expression de modernité liquide pour désigner notre monde actuel, par opposition à la modernité solide au sein de laquelle prévalaient des institutions stables et durables, et où la notion de carrière au sein d’une même entreprise avait encore un sens.

L’individu du XXIe siècle doit constamment s’adapter au flux ininterrompu des innovations socioéconomiques, portées par la rapidité des innovations technologiques. Face à ce phénomène, l’hyper spécialisation devient caduque au profit d’une hybridation des compétences et d’une capacité à l’adaptation et à l’apprentissage constant. En témoignent déjà certaines disparités de salaires pour un même job : selon un rapport récent du cabinet Burning Glass 6, un marketing manager aux compétences classiques perçoit un salaire annuel d’environ 71,000$, tandis qu’un marketing manager qui maîtrise le langage SQL (un langage de programmation permettant d’exploiter des bases de données) touche quant à lui un salaire annuel qui avoisine les 100,000$… D’où l’importance de se former, encore et toujours.

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Dans ce contexte, on peut supposer que les entreprises auront de plus en plus recours aux espaces de coworking qui se font fort d’amener l’opportunité d’apprendre, échanger ou se former directement sur le lieu de travail

L’importance exponentielle des soft skills dans les métiers de demain

Face à ce changement de paradigme global, au sein duquel il s’agira désormais moins de maîtriser une compétence particulière et concrète que de disposer de l’état d’esprit adéquat, on entend de plus en plus parler de l’importance de développer ses soft skills. L’expression anglo-saxonne fait référence aux qualités psychologiques proprement humaines : curiosité, pensée créative, réflexion critique, sens de la communication et de l’écoute, empathie, ou encore, une certaine propension à développer et maintenir des relations interpersonnelles harmonieuses.

Ces atouts vont en effet devenir indispensables pour naviguer dans un monde en ébullition permanente marqué par la disruption. Puisque les outils et les pratiques évoluent à une vitesse inédite dans l’histoire de l’humanité, l’employé de demain devra disposer de suffisamment de ressources psychologiques et culturelles pour savoir rebondir au gré des nouvelles circonstances qui encadreront son travail.

La sensibilité interculturelle à l’honneur dans tous les métiers de demain

Les postes de direction seront les plus soumis à cette nécessité, ainsi que le soutient notamment Simon Gottschalk, professeur au département de sociologie à l’Université du Nevada : « Les qualités imparables aux échelons supérieurs incluront en particulier la capacité à créer du réseau, à gérer les relations publiques, à démontrer une certaine sensibilité interculturelle, et plus généralement ce que l’auteur Dan Goleman appellerait ‘l’intelligence sociale et émotionnelle’. Ceci inclut également la créativité, et juste assez de pensée critique pour sortir des sentiers battus. »

La sensibilité interculturelle relevée par Simon Gottschalk constitue en effet un véritable enjeu à l’heure de l’effacement des barrières physiques au profit du “village planétaire”  (Marshall McLuhan, The Medium is the Massage, 1967), nombreuses sont les compagnies qui ont vu leur image écornée par la faillite de leurs dirigeants sur ce plan.

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Remise en question du paradigme RH traditionnel

Dans un tel contexte, l’industrie des ressources humaines va inévitablement être amenée à évoluer pour s’adapter à ces changements structurels. Jusqu’alors très pragmatiques, elles devront gagner en stratégie puisqu’il ne s’agira désormais plus d’employer les personnes sur leur degré de spécialisation mais davantage sur leur profil et leurs soft skills. Il sera alors impératif pour les professionnels des ressources humaines d’être en capacité de comprendre et d’anticiper les enjeux business des entreprises.

La profession va se trouver confrontée à un autre enjeu majeur car de plus en plus délicat : la fidélisation des employés. Selon une étude réalisée par le cabinet Deloitte en 2018 sur le rapport des Milleniums au travail 6, il apparaît que ces derniers ne se voient pas plus de deux ans au même poste. Une autre caractéristique importante de cette génération, vectrice de turn-over, est l’attachement à l’inclusivité et à la sensibilité interculturelle : 69% des interrogés seraient ainsi prêts à rester plus de 5 ans dans une boite dite, à diversité, contre 27% dans une boite non diverse.

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À l’instar du secteur de la communication, celui des ressources humaines va connaître une forte granularisation afin de répondre au mieux à la complexité de ces nouveaux enjeux. Et ce d’autant plus que de nombreuses applications bourrées d’IA vont être mises à disposition des RH pour les assister, notamment dans le recrutement et le suivi du bien-être des collaborateurs…

On voit d’ores et déjà apparaître certains nouveaux métiers, du spécialiste de l’expérience employé ou de l’expérience candidat, au coach de performance, en passant par le psychologue organisationnel ou encore le chef de la sélection technologique.

Si le secteur de la formation professionnelle s’attèle à pivoter pour répondre aux enjeux de demain, qu’en est-il de nos systèmes éducatifs ? Selon le Pew Research Center 1, sans un renversement du paradigme éducatif traditionnel, ces derniers risquent de devenir obsolètes d’ici à 2026. Désormais, l’enjeu principal de l’éducation réside moins dans l’instruction de connaissances concrètes que dans celle de l’apprentissage continu. Le rapport du cabinet Burning Glass5 appelle ainsi les institutions éducatives à « penser hors des programmes existants et leurs limites ».

En attendant, le web voit s’intensifier la création de programmes et de formations en ligne, propices à accompagner l’apprentissage permanent de l’employé de demain.

Alors, à vous d’agir !

Un article rédigé par Laura Cheradad pour Wojo

Sources & notes :

  • 1 – The Future of Jobs and Jobs Training, Pew Research Center, 2017.
  • 2 – Entreprise leader dans l’innovation open source pour le développement du machine learning.
  • 3 – Think tank californien instigateur de recherches à dimension prévisionnelle, permettant d’appréhender les changements complexes de la nouvelle économie et de définir des stratégies à échelle mondiale.
  • 4 – L’impact de la révolution digitale sur l’emploi, Institut Sapiens, 2018.
  • 5 – The Hybrid Job Economy: How New Skills are Rewriting the DNA of the Job Market, Burning Glass, 2018.
  • 6 – Deloitte Millennial Survey : Millennials disappointed in business, unprepared for Industry 4.0, Deloitte, 2018.

Au fait, chez Wojo on ne fait pas qu’écrire !

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