Jeff Bezos, le dirigeant d’Amazon, détenant une fortune de quelques centaines de milliards d’euros, a annoncé son divorce sur Twitter le 9 janvier 2018. Et cette séparation ne passe pas inaperçue, puisque le « pauvre » homme risque de devoir se séparer d’une bonne partie de sa fortune au passage. Pas facile de ne plus aimer… En tant qu’entrepreneurs, on se pose du coup la question de l’impact d’un divorce, qui relève davantage de la sphère privée, sur la sphère professionnelle. Quelles sont les issues possibles en France ? Si vous êtes entrepreneur, associé d’une SAS ou SARL ou d’une EI, ouvrez grandes vos oreilles (ou vos yeux, plutôt) pour lire ce qui suit.

Le divorce qui chamboule la Tech

Jeff Bezos est actuellement l’homme le plus riche du monde, d’après le magazine Forbes, avec une fortune estimée entre 137 et 160 milliards d’euros. L’annonce de son divorce a déchaîné la toile. Sa femme MacKenzie et lui étaient mariés depuis 25 ans, ils s’étaient donc connus bien avant la création du géant Amazon. D’après le site d’information sur les célébrités TMZ, aucun contrat matrimonial n’avait été établi. Des interrogations se soulèvent en rafale : comment la fortune du patron d’Amazon va-t-elle être divisée ? Ce dernier pourrait-il perdre son influence, liée à son statut de dirigeant le plus riche, au profit de la fortune de sa femme, qui pourrait détrôner la femme la plus riche du monde ?

Une situation qui attise la curiosité outre-Atlantique, mais pas que. Même si les lois ne sont pas les mêmes en France qu’aux États-Unis, il n’empêche que cette situation nous incite à nous interroger sur l’impact d’une histoire de cœur sur l’entreprise que l’on a mis tant d’années à créer et faire fructifier. Ne vous avait-on pas prévenu qu’en amour, on risque gros ?

Je suis entrepreneur.e, que dois-je savoir ?

Le maître mot de la situation ici : l’anticipation. Si vous êtes marié.e et que vous possédez une entreprise, il est de rigueur de prévoir les pires scénarios, même si vous vivez une parfaite idylle pour le moment. Il est important de se prémunir en étant averti. Pour ne pas mettre son activité professionnelle en péril, il convient donc de prévoir les conséquences juridiques d’un éventuel divorce.

Que vous ayez une SARL ou une SAS, tout va dépendre en réalité des modalités du contrat de mariage. C’est le régime matrimonial qui déterminera les pouvoirs et responsabilités de votre conjoint en cas de divorce.  Il existe quatre régimes : communauté réduite aux acquêts, participation aux acquêts, séparation de biens et communauté universelle.

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Communauté réduite aux a-quoi ?

En cas d’absence de contrat matrimonial, c’est le régime de communauté réduite aux acquêts qui sera appliqué, c’est donc le régime par défaut. Dans un cas comme celui de Jeff et MacKenzie Bezos que nous avions pris en exemple, ce serait ce régime qui s’appliquerait, dans le cadre de la législation française.

Le terme quelque peu barbare d’« acquêt » désigne simplement un bien acquis par un conjoint au cours de la vie conjugale. Donc si votre entreprise a été créée à une date antérieure au mariage, bonne nouvelle, rien ne changera au moment du divorce, vous resterez propriétaire de votre société.

Mais si l’entreprise a été fondée après le mariage, elle devient un acquêt : les biens sont mis en commun et l’entreprise appartient aux deux époux (au même titre que les salaires que perçoit le conjoint), qui, lorsque le mariage prend fin, possèdent chacun des parts sociales, titres ou actions égales.

Même s’il s’agit de votre entreprise, vous devriez donc néanmoins racheter la part de votre ancien conjoint pour pouvoir conserver vos parts au sein de la société. De plus, dans ce cas de figure, il convient d’être prudent et surtout de rester en bons termes avec son futur ex-conjoint, qui peut revendiquer s’il le souhaite sa qualité d’associé dans l’entreprise.

Le contrat de séparation de biens : on sépare tout

Quelle que soit l’issue de votre idylle, c’est le régime généralement conseillé aux créateurs d’entreprise, car il protège les biens du conjoint si la société venait à connaître des difficultés financières.

Aussi simple que son nom l’indique, le régime de la séparation de biens garantit le patrimoine de chacun en cas de dissolution du mariage, par divorce ou décès. Ce qui était à vous avant « de dire oui » le reste, ce que vous avez acquis après, également.

Si divorce il y a, il pourra vous être demandé de fournir la preuve de vos droits de propriété : attention donc au nom du/des bénéficiaires lorsque vous faites l’acquisition d’un bien, soit sur l’acte notarié (le cas échéant), soit sur les factures. Le plus prudent étant de conserver des justificatifs.  

Et si vous avez acquis des biens/équipements avec votre si votre ancienne âme sœur ? Alors c’est la règle de l’indivision qui s’applique : chacun récupère sa part au prorata de ce qu’il a versé initialement (là encore, gare aux justificatifs).

Si vous êtes entrepreneur, avec ce régime, pas de crainte à avoir, votre entreprise est safe puisque tous les biens (mais aussi les dettes, soyons logiques) sont propres.

La participation aux acquêts : on sépare, sauf quand ça tourne mal

Le régime de la participation aux acquêts est moins connu, mais c’est ourtant le régime par défaut chez nos voisins allemands. Il pourra vous paraître étrange, mais il est pourtant très noble, notamment lorsque l’un des amoureux exerce une profession à risque, car il protège le conjoint, tout en s’engageant à partager les bénéfices si le couple choisissait de se séparer. Il consiste en  une sorte de combinaison des deux premiers régimes dont on vient de parler. Voici comment ça marche.

Pendant le mariage, quand l‘amour va tout va : à chacun ses biens, exactement comme dans le cas de la séparation de biens décrite plus haut. Votre conjoint est donc protégé des aléas de votre carrière d’entrepreneur et si vous devenez richissime, vous restez seul bénéficiaire de votre succès.

Mais  en cas de divorce ou décès, les choses diffèrent du deuxième régime : il s’agira alors d’additionner la valeur des acquêts des deux conjoints et de diviser cet accroissement de richesse du couple en deux parts égales. Autrement dit, si ça tourne mal, on procède à un rééquilibrage avant de se dire au revoir : celui qui s’est le moins enrichi a droit à 50% de l’augmentation du patrimoine de celui qui a brillé par son génie… (à moins d’avoir pris la précaution d’exclure les biens professionnels de la créance de participation lors de la rédaction du contrat de mariage).

Ce n’est certes pas la porte ouverte à tous les excès pendant que l’autre trimerait, mais attention tout de même aux cigales et aux fourmis : les dettes contractées restent l’affaire de celui qui les contracte. Participation aux acquêts = on partage les bénéfices (fruits d’un travail acharné ET d’économies réalisées pendant la durée du mariage), pas les créances.

La communauté universelle : on met tout en commun

Le dernier régime, la communauté universelle, est le plus rare, c’est une mise en commun totale (sauf clauses contraires) des biens des époux. En cas de décès, le conjoint restant récupère tout ou partie du patrimoine du défunt.

Cas particulier

Il y a un petit hic en plus pour les dirigeants en entreprise individuelle. Dans ce cas, le patrimoine personnel et professionnel se confond. Et le risque se porte alors sur le conjoint non exploitant, qui pourrait bien se retrouver redevable au passage des dettes de l’entreprise. C’est que l’amour n’est pas toujours une histoire de gros sous. Autant dire qu’au moment de créer votre entreprise, il est plus avantageux de se laisser tenter par l’EIRL, qui laisse la possibilité d’établir une déclaration d’insaisissabilité concernant les biens personnels.

En conclusion : limiter les risques

Vous l’aurez compris, il s’agit donc d’anticiper afin de limiter la casse. On n’est jamais trop prévoyant et un mariage, au-delà d’être une belle preuve d’amour entre deux personnes, peut avoir de lourdes conséquences sur son entreprise et dans le pire des cas aller jusqu’à la  perte d’une partie desactions de sa société.

Si vous n’aviez pas pensé à tout cela et n’avez pas de contrat de mariage (et êtes donc dans une configuration de communauté réduite aux acquêts), une bonne nouvelle pour vous : vous avez jusqu’à deux ans après le mariage pour changer de régime matrimonial.

Et si vous n’êtes pas sous le régime de séparation des biens et que votre mariage est vieux de plus de deux ans, pas de panique : vous pouvez toujours aller voir votre notaire et demander à modifier des clauses du contrat, à la seule condition que les deux époux soient d’accord.

Dernier recours possible : prouver que l’on est bien propriétaire de l’entreprise via la mise en place d’une déclaration d’emploi ou de remploi, au moment de la création ou reprise de l’activité pour attester du financement de l’opération sur vos ressources personnelles.

Même en amours, la paperasse reste la paperasse, que voulez-vous !

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